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Quant aux critères qui déterminaient le choix, outre le fait de bien connaître la famille, plusieurs qualités devaient être observées non sur la femme à épouser, mais sur ses parents et de préférence sur la belle–mère. Car pour les Beti anciens, il fallait tout simplement appliquer l’adage selon lequel « si tu veux connaître comment l’antilope se comporte en brousse, observe le mouton au village ». En d’autres termes, pour connaître le comportement d’une fille, observe sa mère. Pour cela, le père ou la mère du jeune homme devait avoir passé des jours dans la famille ou alors chez les futurs beaux–parents de leurs fils. La mère s’occupe–t–elle bien de son mari ? Et sa case, est–elle bien entretenue, l’intérieur, les ustensiles. Comment s’adresse–t–elle aux personnes dans sa maison, à son mari ? Ces critères sont ceux que la mère du garçon doit observer chez son homologue avant ceux qui engagent la pérennisation du lignage, ou le bien–être de toute la famille. Ainsi donc, parmi les autres critères qui entrent en jeu, nous pouvons citer la force au travail de la belle–mère, sa fécondité car une femme qui ne faisait pas beaucoup d’enfants n’était pas considérée dans la société beti. Il faut choisir la fille d’une femme dont la famille n’est pas citée dans des problèmes de sorcellerie, d’adultère, mais plutôt une fille dont la mère est issue d’une famille riche, de grande renommée, travailleuse. Car ces qualités, la fille pourrait les avoir dans sa nouvelle famille et les transmettre à ses enfants. Ce sont là des critères primordiaux qui justifient le choix que les parents faisaient pour leur fils. Dès lors, ces qualités observées, le père allait auprès des parents de la fille pour « consigner » la femme qui parfois n’était même pas encore en vie. Car des fois la mère était encore enceinte. La démarche adoptée, le lecteur peut la retrouver dans l’article sur les formes de mariage. Cette pratique d’arranger les mariages est en partie la raison qui justifie la solidité des mariages, la rareté des divorces et le comportement responsable des femmes beti dans leur foyer. Car la décision d’union n’appartenait pas aux conjoints mais plutôt à leurs parents qui du haut de leur sagesse, de leur expérience de la vie savaient quoi faire pour le bonheur familial de leur progéniture. Et les enfants par obéissance et leur confiance en leurs parents le leur rendaient bien. De nos jours malheureusement, tout cela n’est plus que vague souvenir. En effet, les mariages chez les Beti se caractérisent pour certains par une instabilité notoire, la récurrence des problèmes, en un mot par un échec. Néanmoins, dans certains groupes beti tels les Fang, Mvae, Okak, Ntumu, … l’on remarque encore ça et là des jeunes qui se marient après un arrangement survenu entre les parents. Ces pratiques subsistent donc encore dans des familles où le plus souvent les moyens matériels font défaut, ou des familles où les enfants ne sont pas allés à l’école, notamment en campagne. Dans des familles nanties, où les enfants vont à l’école, les mariages arrangés existent aussi mais les motivations ne sont plus les mêmes : l’arrangement des mariages vise à s’assurer la fortune de l’un ou l’autre des conjoints. Ou alors les mariages sont arrangés pour mettre ensemble la fortune des deux familles. Nous pouvons donc dire sans ambages que c’est l’appât des biens matériels qui justifie les mariages arrangés entre familles nanties. Les conséquences de ces mariages sont plus ou moins connues de tous, divorces, querelles, luttes de leadership dans le foyer car les deux conjoints étant issus de familles riches, personne ne veut se laisser dominer par l’autre et chacun veut dicter sa loi car nul n’a rien à demander à l’autre. Et lorsque survient le divorce, c’est le déséquilibre dans la famille, le tiraillement, les enfants qui se retrouvent embarqués dans un combat d’adultes. Toutes choses que la sagesse de nos ancêtres a su éviter dans leur temps. En tout état de cause, nous pouvons dire que les mariages dans les temps des Beti anciens étaient arrangés et cela a contribué activement à la solidité des foyers et partant des familles. De nos jours, ces pratiques ont fortement régressé, les mariages pour la plupart prennent pour point de départ les cours d’école, les campus d’université, les colonies de vacances… dans les campagnes, la pratique se rencontre encore dans certaines familles tandis que pour les familles riches, les mariages arrangés visent surtout à assurer le bien–être matériel des deux familles. Et les conséquences sont parfois néfastes.
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