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« Ñyabane jaé » qui est une sorte de massage traditionnel avec de l’eau chaude, survient après l’accouchement, bien que de nos jours, cette pratique soit en train de disparaître à cause des autres tribus c’est–à–dire leur manière de faire et aussi à cause des exigences du modernisme. En réalité, si le Beti–Bulu–Fang le faisait, c’était parce qu’il estimait que la femme qui a accouché a beaucoup souffert, qu’elle a rencontré beaucoup de difficultés et par conséquent on doit la protéger pendant un bon bout de temps pour l’amener à mieux récupérer ses forces, à mieux se refaire en la lavant avec de l’eau chaude et en mangeant une bonne nourriture, c’est ce qu’on a appelé « e yabane jaé/e yaba dzèñ ». Avec le jaé, il était également question de s’occuper du bébé à tout point de vue. De nos jours, la pratique « jaé/dzeñ » est entrain de finir car il est monnaie courante de voir une femme accoucher aujourd’hui et trois jours plus tard, elle sort pour aller au bureau en confiant le nouveau–né à une femme de maison ou à une berceuse qui reste s’occuper de lui pendant qu’elle–même est au travail. Il y a une chose qu’elle ignore, c’est qu’elle a souffert et qu’elle a besoin de beaucoup de repos car l’accouchement c’est la mort à petit feu, et même qu’elle ne doit pas confier son bébé à quelqu’un d’autre. Tout ceci n’est qu’un exemple du comportement des Beti–Bulu–Fang de nos jours hérités des autres tribus. A cet effet, les jeunes aujourd’hui sont invités à faire une synthèse c’est–à–dire prendre ce qui est bien dans les coutumes ancestrales et ajouter à cela les connaissances livresques acquises tout au long de leurs études, ainsi ils seront complets. La pratique « Jae/dzèñ » La femme allait généralement accoucher chez ses parents et c’est dans sa famille qu’elle passait son congé de maternité, « e yabane jae ». Après l’accouchement et dès la sortie de la maternité, on amène la femme à la maison de préférence dans la cuisine, on racle les bords du lit qui a été confectionné pour le rite « Jae » plus précisément le côté avant et arrière du lit. La poudre recueillie lui est remise pour qu’elle l’aspire comme prise (e vebelan). Cette prise permet de blinder le lit destiné au rite. Et ce blindage permet à la mère c’est–à–dire « njejae » d’être à l’abri des sorciers ou mieux de toute pratique de sorcellerie ou de nuisance et l’épargne de tout danger ou même de la présence d’un esprit maléfique. Exemple : s’il arrive qu’un sorcier prenne place sur son lit, elle ne court pas le risque d’être malade (fuma jae) « la gale ». Elle ne risque pas d’attraper les boutons ni même la gale ainsi que son enfant. Après cela l’on prend une grande marmite appelée « Minkeñe » ou une grande casserole que l’on place à côté du feu. Dans cette marmite on met des écorces et des herbes aux vertus reconnues :
A cela on ajoute :
Précisons ici que les boutons et la gale sont les deux maladies qui menacent le plus la mère et son bébé lorsque leur sanctuaire a été violé par une personne mal intentionnée. C’est pour cela que dans le temps, quand le jae battait son plein, si une femme est entrain de subir le jae et qu’elle a une bébé–fille, s’il arrive qu’une femme entre dans la maison avec une houe, on lui demande de rentrer et d’aller laisser sa houe à l’extérieur. Car, si elle entre dans la maison avec sa houe là où une femme vient d’accoucher (e yabane jae), elle vient donner l’aka’ae au bébé. Si c’est un homme qui entre dans la maison tenant la lance et la machette, on lui demande d’aller déposer ses outils dehors. S’il entre avec dans la maison, il vient donner au bébé–garçon l’aka’ae. C’est pour toutes ces raisons qu’on a toujours dit que la marmite de jae « vi’e jae » est sacrée ainsi que le lit du jae « énoñ jae »et même la maison du jae « nda ba yabane jae ». une femme qui vient d’accoucher est donc une personne sacrée, avec son enfant, et ils ne sont pas abordés à la légère. Ainsi, la femme qui vient d’accoucher ne salue pas n’importe comment, à la rigueur ne salue même pas. On lui dit juste bonjour. Elle a sa cuillère, son verre, ses assiettes, son seau est à un endroit précis. Les gens ne s’assoient pas sur son lit. Elle ne sort pas avec le bébé jusqu’à un certain temps établi par sa mère ou sa grand–mère. De nos jours, les gens d’aujourd’hui disent « Ah ! Ah ! Il n’y a plus rien, tout est fini ». Tout n’est pas fini, nous devons garder les coutumes de nos parents. Par cette négligence, on a de mauvaises choses en ce moment. Alors qu’avant un enfant pouvait être sevré sans avoir eu des problèmes de fontanelle, sans tomber malade, il pouvait juste avoir de petits boutons ou même des vers car il trotte par terre. En ce moment, il se passe souvent que les enfants convulsent et des tas d’autres choses parce qu’on ne garde pas les coutumes des ancêtres. Ils disent seulement « qu’y a–t–il encore ». L’enfant naît, on ne lui met pas les cordes. Notre coutume veut que, quand l’enfant naît, on prend le « Ngone fé », le raphia qui pousse dans la brousse, on tisse tout ceci et l’on attache cela sur la taille du bébé, aux pieds et aux poignets. C’était pour le blinder contre le paludisme et pour qu’il ne convulse pas jusqu’à ce que ces cordes tombent seules. Quand une femme a accouché « yabane jae », son père ou son frère va en brousse râper le « Baa » (c’est un arbre qui mousse quand on le râpe et laisse couler un liquide rougeâtre comme du sang, très utile pour la femme qui vient d’accoucher et la poudre recueillie après râpage peut être utilisée pour les cas d’anémie), puis les écorces de l’arbre appelé « Esi ». Cet arbre a une couleur rouge et se trouve habituellement au milieu ou mieux encore au cœur de la forêt. On râpe donc cette écorce en prenant soin de recueillir goutte après goutte tout en continuant à gratter. Puis on écrase l’autre écorce qui laisse sortir un liquide et après avoir recueilli tout ceci, on le mélange dans un gobelet bien propre en y ajoutant de l’huile de palme. Ainsi, pendant qu’on frappe de l’eau chaude à la nouvelle maman, elle s’enduit du Baa en alternant avec l’huile rouge. Quand on constate que l’eau destinée à son lavage/massage est finie et pendant qu’elle attend que l’eau soit à nouveau bien chaude, elle s’enduit de produits pour éviter à sa peau d’être sèche. Tout ceci permettait à la femme d’être très belle et lui donnait une peau radieuse. On pouvait remplir l’eau plusieurs fois quand l’eau de la marmite finissait. Pour taper de l’eau, l’on se sert d’un petit balai confectionné pour la circonstance. A cet effet, on tape l’eau directement sur elle ou alors elle retient cette eau avec ses mains, elle masse son ventre. C’était beau à voir, car rythmé par celle qui tape cette eau chaude, tout un art, cela pouvait même s’accompagner des chants. La Njejae se lave au minimum trois fois par jour ; le grand bain du jae se déroule très tôt le matin. Les coépouses de sa mère, les tantes et autres viennent aider à puiser de l’eau, à ramasser du bois et apportent de la nourriture. C’est seulement pendant le bain du soir qu’elle peut se oindre avec de l’huile moderne. Tout ceci se déroule sous le regard attentif de la mère qui veille à ce que sa fille se lave trois fois par jour, qu’elle mange convenablement et qu’elle ait en permanence son baa et l’huile rouge, son honneur en dépend, car à la sortie du jae si la njejae n’est pas belle, propre, dodue ainsi que son bébé, on va déduire que le jae s’est mal déroulé et par conséquent, sa mère ne s’est pas bien occupée d’elle. Ne perdons pas de vue que la Njejaé s’enduit du baa seulement pendant le bain du matin. De même, le feu qui sert à chauffer l’eau du jae et même sa cendre ne doivent en aucun cas sortir de la cuisine, et chaque fois qu’on se rend compte qu’il y a déjà beaucoup de cendres ou même quand on nettoie le foyer, le matin, cette cendre est directement jetée sous le lit et toute personne venant de l’extérieur ne doit en aucun cas prendre le feu du jae et ceci jusqu’à la fin du jae. Pendant le jae, la Njejae ne sort pas, elle et son bébé restent dans la cuisine pendant tout le temps que durera le jae (un à trois mois). Pendant ce temps, elle ne fait absolument rien à part manger, se laver et s’occuper de son bébé. Aucune tache à remplir à part la lessive du bébé et la sienne propre. A la fin du jae on ramasse toute la cendre et on prend également la grande marmite qui a servi à chauffer de l’eau puis on prend un doigt de plantain « Akos Ekon » qu’on prépare dans cette marmite, ensuite on le fait manger à la Njejae. Au moment de sortir de la cuisine, on lui fait encore aspirer la prise du lit du départ. Puis on récupère toute la cendre amassée qu’on va enterrer sous le pied d’un bananier prêt–à–porter le régime, c’est pour que la femme continue à accoucher, et après enterrement de ces cendres, la femme peut déjà sortir, vaquer à ses occupations en attendant que son mari vienne la chercher avec beaucoup de cadeaux pour ses belles mères. On dit alors qu’il vient « casser la marmite du jae » « e boé mvé/vie’e jae ».
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